lundi, 18 février 2008
Chavirage de Groupama 3
Franck Cammas : "le flotteur sous le vent s'est rompu
juste à l'arrière du bras avant" ...
Tiens, tiens, pas loin de l'emplacement du foil !
© Yvan Zedda
Vous n'avez pas pu passer à côté de la (mauvaise) nouvelle maritime du jour : le chavirage de Groupama 3 dans sa tentative de record autour du Monde (Trophée Jules Verne). Petit éclairage sur l'évènement, à chaud.
Dingos
C'est le mot qui me vient à l'esprit quand je regarde les vidéos filmées à bord. Voir ici et ici (c'est la même séquence coupée en 2).
Dingo pour qualifier ce que font ces marins quand ils partent autour du Monde et les risques qu'ils prennent en toute connaissance de cause.
Dingo pour qualifier notre époque moderne, Jacques Caraës et le service de Com de Groupama qui a déjà récupéré les images (y compris celles des sauveteurs), fait un montage vidéo et mis le tout en ligne sur Internet.
Respect
Respect pour ces gars qui gardent leur sans froid depuis la tentative d'empannage instantané pour sauver le bateau jusqu'à l'organisation - démontage du bateau et l'hélitreuillage avec sa phase très délicate 'je me jette à l'eau'.
Respect pour les sauveteurs qui témoignent sur la TV Néozed (1) "ça c'est passé comme dans un livre".
Respect enfin pour Franck Cammas qui laisse percer son émotion dans les vacations radio suite au chavirage, lui qui a plutôt un ton de voix habituel 'fanfaron' ben là les trémolos dans la voix, ça permet juste de mesurer un peu mieux ce que les gars sont en train de vivre ... Pourtant ils sont déjà projetés dans le futur et la récupération de leur beau joujou.
Une dream Team improbable
Un Stève Ravussin qui met la bonne humeur et a certainement prodigué ses conseils suite à sa relativement grande expérience de la vie à bord d'un trimaran retourné et des opérations d'hélitreuillage en pleine mer ;-). Un Jan Dekker (le Sud africain bilingue) comme interprète principal pour coordonner les secours. Un Loic Le Mignon toujours prêt à aller faire le spiderman dans le gréement, les acrobates à califourchon en bout de coque ou encore à jouer l'homme grenouille (il semble qu'il ai faillit ne pas pouvoir remonter à bord de Groupama 3 qui dérivait à 3 noeuds ... nager avec une combinaison TPS c'est pas terrible pour battre le record du 100m). Le Jacques Caraës qui ne lâche jamais sa caméra et nous gratifie d'images prises sur le vif tout simplement hors norme. Les 2 Franck qui font parler l'expérience sur l'eau comme avec les médias. Et puis les plus discrets bretons qui ne causent pas, durs à la tâche et qui agissent dans l'ombre à l'image de Séb Audigagne qui démonte, comme si de rien n'était, les instruments électroniques pour les sauver du naufrage ou d'un Ronan Le Goff qui fait le sherpa (il peut, il a juste un peu la caisse pour) et qui charrie à terre un max de choses. Qui ai-je oublié ? Le barreur hors pair Fred. Le taiseux, hors quart et toujours derrière son clavier qui sentait enfin pointer le bon coup météo, Yves Parlier qui comme les autres s'est pris le ciel sur la tête !
Pourquoi cette casse ?
Sans vouloir faire de grandes théories sur le carbone haut module, les calculs des cabinets d'architectes navals, les phénomènes vibratoires incontrôlés et j'en passe; je suis juste surpris que les commentateurs avisés ne mettent pas plus en avant le fait que Groupama 3 est le 1ier voilier à foils qui vient se frotter aux mers du Sud (lire ce que j'écrivais sur le sujet ici).
Une configuration d'appendices qui induit des efforts particuliers sur les coques puisqu'elles "planent". Et faut bien reconnaître, à tout le moins, qu'on manque un peu d'expérience sur la fatigue qu'induisent les foils sur les coques par mer formée et sur de longues périodes ... En tout cas je note, est-ce un hasard ?, que le flotteur a cassé pas loin du foil. L'équipage lui évoque plutôt comme origine de la fortune de mer les chocs répétés des vagues sur la coque au vent comme après l'hécatombe des multicoques ORMA 60 pieds lors d'une certaine Route du Rhum. Les experts devraient nous en dire plus bientôt ... surtout si l'équipe Groupama arrive à récupérer le bateau.
Note
(1) voir l'extrait vidéo d'un journal télévisé dégoté par Helmina du forum Cup In Europe.
Encore plus de vidéo
Cette fois des images exclusivement prises depuis les hélicoptères par les sauveteurs, merci à Tiketitan.
23:55 Publié dans 1. Regards sur la Mer | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : Trophée Jules Verne, Record, G-Class, fortune de mer
samedi, 09 février 2008
Coups de griffe autour d'une carte marine
Comme tous les passionnés de voile je suis un lecteur régulier de l'un des sites incontournables pour suivre l'actualité nautique de compétition : Course Au Large. Les reproches faits à ce site web par la communauté des voileux-internautes sont connus :
- un service payant pour les articles de plus de 24h (ce qui n'a pas toujours été le cas mais il faut bien (essayer ?) de vivre, l'omniprésente pub participe aussi à cet objectif de rentabilité)
- autre grief : une recopie trop systématique des communiqués de presse (sans forcément jouer la transparence en précisant la nature et la source du communiqué)
- enfin la (quasi) absence de contenu propre mais que voulez-vous sans journaliste comment faire mieux que Liens de Mer ;-) ?
L'actualité nautique vue par Course Au Large
Parfois cette ligne éditoriale faiblarde de CAL (pour les intimes) et ce manque cruel de moyens se fait jour par exemple dans la brève ci-dessus.
"Gitana 13 a enfin réussi à passer le Horn contre les vents et courants dominants durant cette nuit de jeudi à vendredi. C'est en tous cas ce qu'on peut déduire de la cartographie du site Internet du maxi catamaran de Lionel Lemonchois."
Il s'agit là d'un traitement de l'information nautique peu digne d’un site web nautique qui se veut être LA référence dans son domaine. Des propos qu’on croirait tirés de la dernière discussion au « bar du port ». Sur ce terrain de l'interprétation des cartes marines, la "rédaction" de Liens de Mer peut jouer à armes égales avec CAL ... avec une pincée de second degré en prime.
La même actualité nautique vue par Liens de Mer
Gitana 13 à l´abri de la Terre de Feu
Si vous regardez attentivement la carte
vous verrez qu'ils ont même mis pied à terre !
(image non truquée issue de la cartographie
officielle du Team Gitana)
Comme CAL, je suis un observateur avisé du parcours suivi par Gitana 13 sur la Route de l'Or et j'en déduis après expertise nautique personnelle de la carte interactive des informations bien plus intéressantes que ce que nous en dit CAL. En l'occurrence qu'après 5 jours pendant lesquels Gitana s'est trouvé devant les portes fermées du Cap Horn (pour cause de conditions météorologiques exécrables) et après avoir sillonné dans tous les sens la Terre de Feu à la recherche d'un abri, je déduis que l'équipage a finalement décidé de mettre pied à terre près du Cap San Diego, y a fait escale voire même a débarqué en Tierra del Fuego. Si si ! Il n'y a qu'à regarder attentivement la carte ...
Ah mon pauvre Monsieur les règles de la course au large ne sont plus ce qu'elles étaient. Après le tour du monde sans escale où il est possible de mettre son bateau en chantier (cf. Téménos dans la Barcelona World Race) et où il est aussi possible de changer de skipper en cours de route (*), voici dont le record New-York -> San Francisco par le Cap Horn où il est possible d'attendre sagement à terre des conditions optimum (?) pour passer le mythique Cap Horn contre vents et courants !
Note :
(*) cf. les règles de course de la Barcelona World Race, qui autorisent, sous certaines conditions bien-sûr, le remplacement du ou des skippers d'un bateau pour permettre au voilier de participer à l'ensemble de l'épreuve et donc offre au sponsor une visibilité "garantie" sur toute la durée de la course. Heureusement ce cas ne s'est pas présenté mais il avait été prévu comme tel par l'organisateur Mark Turner qui est loin d'être à court d'imagination pour se rapprocher de la pathétique America's Cup où les règles de régate sont tellement complexes que le grand public n'y comprend rien ... sans même parler des épisodes qui conduisent les concurrents devant la justice ...
PS pour être juste :
Reconnaissons quand même au site Course Au Large, deux mérites :
- d'une part une iconographie illustrant les articles assez réussie avec souvent de belles et grandes images de voiliers en pleine action
- d'autre part une certaine réactivité [ sauf le week-end ;-) ] aux évènements qui se déroulent en mer.
08:55 Publié dans 1. Regards sur la Mer | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : actualité nautique, journalisme, carte marine, règles de course
dimanche, 03 février 2008
Gréement Thonier
Je viens de tomber sur une superbe photo ancienne de thonier avec ses "cannes à pêches". Dans une précédente note je parlais d'outrigger et je m'en voulais un peu de ne pas avoir été plus explicite à l'attention des lecteurs de Liens de Mer qui ne sont pas forcément des férus de technologie nautique.
Voici donc un beau thonier du début du siècle dernier avec ses cannes qui servaient à tirer des lignes à thons :
Et voici le gréement dit "thonier" sur un monocoque de course au large. La ressemblance s'arrête à la silhouette car ici bien-sûr pas question de pêche mais d'un système d'espars, les fameux outriggers, pour assurer la tenue du mat :
La voile de compétition a parfois recours à l'histoire maritime et à des termes poétiques pour désigner ses inventions high-tech.
18:10 Publié dans 1. Regards sur la Mer | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : vocabulaire, photo, encyclopédie, histoire
jeudi, 13 décembre 2007
Fortune de mer : avantage outrigger
La flotte IMOCA; répartie sur 2 courses : la Transat B to B et la Barcelona World Race; a souffert ces derniers jours. Parmi les nombreuses avaries, deux ont particulièrement attirées mon attention, il s'agit des démâtages d'Armel Le Cléac’h et de celui de Jérémie Beyou/Sidney Gavignet.
D'un côté Armel, seul, a réussi à confectionner un gréement de fortune qui «présente bien» avec l’un de ses outriggers(1) rescapé (l'autre outrigger comme le mât est parti au fond).
De l'autre côté Jérémie Beyou et Sidney Gavignet sont tout juste arrivés à gréer leur tourmentin entre les deux dérives de leur monocoque obtenant un gréement de fortune à faible capacité propulsive.
En photo la comparaison est saisissante
Armel : un gréement de fortune qui a de l'allure ...
efficace et sûr (noter l'installation de l'écho radar)
Image reproduite AVEC l'autorisation de Windward.fr
Jérémie et Sidney : quand il ne reste plus rien ...
un gréement de fortune minimaliste
Image reproduite SANS l'autorisation de Pipof.com ;-)
Paradoxe
Pour la sécurité des courses au large le gréement thonier (appelé ainsi en référence à l'ancien mode de pêche à la bretonne ... loin des modernes thoniers seneurs et de leurs grands filets tirés à grands renforts de dérivés du pétrole) représente un avantage certain et augmente, en cas de démâtage, les chances de rentrer à la maison au port par ses propres moyens.
C'est amusant de constater qu'un choix effectué pour la performance (les outrigger permettent d'obtenir des mâts pivotants) s'avère au bout du compte être aussi un bon choix ... pour la sécurité des marins. De là à les rendre obligatoires pour les courses au large ... il n'y a qu'un pas que personne, à part moi-même dans mes élucubrations les plus délirantes, n'oserait franchir !
Note
(1) on pourrait traduire en français le mot outrigger par "raidisseur extérieur de haubans". Ah la poésie de la langue française comparée à l'efficacité de la langue anglaise ! En voile côté "business" la francophonie n'est pas prête de gagner du terrain ... Mais côté coeur reconnaissons que cela a un charme terrible d'utiliser un tel terme chargé d'histoire et de poésie.
00:20 Publié dans 1. Regards sur la Mer | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : fortune de mer, course au large
mardi, 30 octobre 2007
Trans Pacifique sur un catamaran de sport
Amis voileux, avant que l'actualité nautique de la Transat Jacques Vabre ou de la très prochaine Barcelona World Race(1) ne vous aspirent tout entier dans leurs grands tourbillons, je voudrais vous présenter une aventure, plus modeste et réellement hors du commun.
Igor Bely et Betao Pandiani se sont lancés dans une traversée du Pacifique sur un catamaran sans cabine de 25 pieds. Partis le 9 octobre au matin de Valparaiso (Chili), ils visent le nord de l'Australie en feront des escales mythiques comme l'île de Pâques (Rapa-Nui, 1ière escale, où ils viennent tout juste d'arriver) ou Tahiti ... plus de 8 000 miles à parcourir !
A l'image d'autres navigateurs amateurs éclairés, comme Pierre-Yves Moreau et Benoît Lequin qui eux essayeront, sous peu, d'améliorer le record de la traversée de l'Océan Atlantique, rien n'est laissé au hasard autant dans la préparation du voilier que dans la communication. Côté préparation on notera par exemple une réserve de flottabilité en haut du mat, un système de re-salage à base d'une grosse "poche d'eau" ou encore la petite tente posée sur le flotteur pour tout abri. Côté communication : un ordinateur portable étanche avec les liaisons satellite qui vont bien et derrière la plume le clavier un Igor inspiré.
Evidemment sur un tel périple la grande Aventure est au RDV. Quand la température de l’eau dépasse à peine les 10 degrés. Quand il faut "faire" son eau douce (prendre le dé-salinisateur et pomper 400 fois ... "En une heure j’ai fait 6 litres : résultat de 2400 coups de pompes. Je vais arriver en Australie avec des bras énormes !"). Et les inévitables avaries qui vous rappèlent, si besoin était, que sur l'Océan il y a très très peu d'écart entre un navire que l'on dirige et une radeau à la merci des flots ... cf les fissures découvertes en mer sur les cages de leurs safrans. A l'échelle du Pacifique, immense, peu fréquenté et surtout pas très Pacifique (même en été) ... ça fait froid dans le dos.
Alors si vous voulez suivre les aventures de BBB (Bye Bye Brasil) plusieurs solutions :
1° Pour démarrer et faire connaissance avec ces 2 navigateurs et leur projet, commencez ici et là.
2° Seconde solution : vous mettre au portugais et aller visiter le site officiel de l'exploit très riche en photos (l'accès direct aux photos c'est ici).
3° Enfin, peut-être le plus simple, écrivez un petit mail à pauline.ladet@hotmail.fr qui se fera un plaisir de vous ajouter à la newsletter qu'Igor rédige en français et vous recevrez des nouvelles en direct depuis le milieu de l'Océan Pacifique !
(1) Précision : il ne faut pas non plus oublier les solitaires (Joyon / Coville) qui vont partir à l'assaut du globe sur 3 pattes, parce que ça aussi ça va nous tenir en haleine pendant les prochaines semaines.
12:40 Publié dans 1. Regards sur la Mer | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : exploit, voile, sport, amateur