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mercredi, 12 novembre 2008

Vendée Globe : retour sur une collision


Les traces d'une rencontre du 3ième type
entre un mythe et la dure réalité

Après une entrée en matière un peu légère (si vous avez raté la charade en images, allez voir ici), retour à une analyse plus sérieuse et surtout plus conforme à la ligne éditoriale qui anime Liens de Mer depuis ses débuts : un traitement original et de qualité de l'actualité nautique.

Retour donc sur la collision, dans les premières heures de course, entre Bernard Stamm et ce qui s'avère (d'après le système AIS - Automatic Identification System -) être un petit cargo.

De tous les accidents de ce début de Vendée Globe 2008, l'avarie survenue à Bernard Stamm est particulière car elle est dûe à une force exogène. J'entend par là (au delà de la référence douloureuse à l'affaire du Bugaled Breizh) une avarie qui n'est pas directement liée aux 3 éléments constitutifs du Vendée Globe et qui ont d'ailleurs forgé sa légende : un homme, la mer et un bateau ...

Revenons et expliquons point par point les 3 images de la charade :

- mon premier : le voilier et son skipper solitaire

- mon second : le petit caboteur ou la dure réalité maritime du XXIe siècle !

- mon tout : avantage au gréement classique.

 

Mon premier est un voilier mené en solitaire

Il faut savoir que la navigation en solitaire contrevient au REGLEMENT INTERNATIONAL pour prévenir les abordages en mer et plus précisément à la Règle 5 / Veille (de la Partie B — Règles de barre et de route / Section I — Conduite des navires dans toutes les conditions de visibilité ... on ne badine pas avec les références des textes administratifs !), règle qui stipule :

"Tout navire doit en permanence assurer une veille visuelle et auditive appropriée, en utilisant également tous les moyens disponibles qui sont adaptés aux circonstances et conditions existantes, de manière à permettre une pleine appréciation de la situation et du risque d’abordage."

Une veille qui par nature ne peut pas être assurée ou du moins de manière réellement permanente par un solitaire ... ce dernier devant de temps en temps aller dormir (même si ce n'est que par tranche de quelques minutes et au total souvent moins de 4h par jour).

 

Mon second est un petit cargo qui effectue du cabotage dans le Golfe de Gascogne

Le Koralle (IMO 8415201) est un vaillant acteur de nos échanges mondialisés (pour avoir une idée même partielle de l'intensité du trafic maritime en temps réel allez voir la carte ici, les bateaux sont représentés par des points rouges). Pourtant ce cargo, en route sous pilote automatique, n'assure pas non plus la réglementaire "veille permanente" évoquée ci-dessus !

Et pourquoi me direz-vous ? Et bien tout simplement parce que, sans remettre en cause son équipage, certains intérêts, d'ailleurs souvent en dehors du bord, prennent le pas sur la sécurité en mer. On peut citer la réduction des coûts d'exploitation, la rente des états pavillon ... qui sont autant d'enjeux barbares derrière lesquels se cachent de bien tristes réalités pour la marine marchande et ses hommes : formation minimale des navigants, sous-effectif chronique à bord, rythme de travail harassant même à l'escale ...

Je ne cherche aucune excuse à l'équipage du petit « cargo tamponneur » mais je souhaite, à l'occasion de cette collision malheureuse, attirer l'attention des voileux (dont je suis) et rappeler que souvent ces inconscients sur leurs bateaux en fer (malheureusement parfois même ces bourreaux) sont aussi des victimes : victimes d'un système qui comme la finance manque cruellement d'un cadre mondial, d'une volonté affirmée de mettre de l'ordre dans notre système contemporain où des hommes confortablement installés dans leurs fauteuils à terre font, par leurs décisions privilégiant leur intérêt particulier et tirant partie de législations très variables selon les pays, courir des risques à d'autres hommes en mer. Sur les océans, on le sait, le risque zéro n'existe pas mais les progrès bien réels des nouvelles technologies de navigation dans la prévention des abordages en mer ne masqueront jamais totalement l'irresponsabilité actuelle des acteurs du transport maritime. Abordages (1) et marées noires sont malheureusement là pour, de temps à autre, nous le rappeler cruellement.

 

Mon tout est un retour au port avec un bout dehors en "chou fleur"

Bernard Stamm peut s'estimer, relativement, heureux de son sort. Je vous entend d'ici crier « mais il est fou ce Nam ! ». Et bien non, je m'explique.

Bernard a opté pour (un bateau avec) un gréement traditionnel c'est-à-dire sans les fameux outriggers, et vue la trace laissée par l'étreinte entre le cargo et son voilier Cheminées Poujoulat ... bien lui en à pris ! Car les 2 coques ont bien frotté l'une contre l'autre sur 10 bons mètres pas loin du maitre-bau et dans de telles circonstances les outriggers qui dépassent de la coque auraient littérallement été fauchés au passage ... avec pour conséquence un démâtage immédiat ! Au contraire malgré le choc, son mat est resté debout même si, aux dernières nouvelles, l'espar en carbone n'est pas complètement indemne.

Dans une ancienne note comparant les 2 types de mats à l'occasion de la Transat B to B et de la Barcelona World Race, j'avais accordé photos à l'appui et pour établir un gréement de fortune, un avantage à la version gréement thonier. Et bien en cas de « smack » avec un cargo l'avantage va clairement au gréement « classique ». Ce qui confirme qu'en voile, en dehors même de l'aspect performance, le choix d'un mat est lourd de conséquences ...

 

___

Note

(1) il ne se passe par exemple pas une solitaire du Figaro sans un événement de ce type, cf pour l'édition 2008 la mésaventure de Franck Le Gal.

07:56 Publié dans Vendée Globe 2008 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : vendée globe

 
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